La justice marocaine favorable à l’extradition du Français Sébastien Raoult aux États-Unis
Selon un document consulté lundi par l’AFP, la Cour de cassation du Maroc a prononcé un « avis favorable » à l’extradition vers les États-Unis de Sébastien Raoult, un ressortissant français de 21 ans recherché pour son implication présumée dans une affaire de cybercriminalité contre des entreprises américaines.
La Cour de cassation du Maroc a prononcé un « avis favorable » à l’extradition vers les États-Unis du Français Sébastien Raoult, accusé de cybercriminalité visant notamment des entreprises américaines, mais il peut encore espérer obtenir sa remise à la France.
Dans une décision rendue le 20 juillet, la plus haute cour du pays « n’a pas ordonné » l’extradition du Français de 21 ans, incarcéré depuis deux mois au Maroc, mais s’y est dite « favorable », a expliqué lundi à l’AFP une source marocaine proche du dossier.
L’extradition elle-même ne peut être décidée que « par le Premier ministre sur proposition d’une commission réunissant aussi les ministres des Affaires étrangères et de la Justice », a-t-on ajouté de même source.
Pour motiver sa décision, la Cour de cassation indique que la demande d’extradition a été présentée par les États-Unis « dans le délai prévu par la loi », accompagnée de tous les documents nécessaires.
En outre, elle précise que les « crimes » pour lesquels le Français est réclamé par les Américains « ont leurs équivalents dans le code pénal marocain » et ajoute que « la demande d’extradition remplit toutes les conditions exigées par la loi ».
Cette décision « nous renforce dans notre détermination à obtenir l’extradition en France de Sébastien Raoult », a réagi auprès de l’AFP son avocat, Me Philippe Ohayon, qui a réitéré sa demande d’ouverture d’une information judiciaire en France, assortie d’un mandat d’arrêt français pour obtenir l’extradition de son client vers la France.
Passible d’une peine de 116 ans de prison
Sébastien Raoult est incarcéré depuis le 2 juin à la prison de Tiflet 2, près de Rabat. Il est passible d’une peine de 116 ans de prison aux États-Unis, selon Me Ohayon.
Les autorités américaines réclament l’extradition de cet étudiant de 21 ans originaire d’Épinal pour son implication présumée dans une affaire de cybercriminalité visant des entreprises, américaines notamment.
Selon l’acte d’accusation américain du 10 juin transmis au Maroc et consulté par l’AFP, la justice de l’État de Washington accuse notamment Sébastien Raoult de « complot en vue de commettre fraude et abus électronique », « fraude électronique » et « vol d’identité grave ».
La justice américaine le soupçonne d’être un membre des « ShinyHunters » – référence à l’univers des Pokémon – accusés d’être des « cybercriminels prolifiques » depuis « au moins 2019 » par les autorités américaines, et qui auraient visé notamment GitHub, propriété de Microsoft.
L’acte d’accusation américain rapporte que GitHub a transmis en mars 2022 des informations supplémentaires au FBI sur les attaques dont la plateforme a été victime, transmettant des adresses IP attribuées à Sébastien Raoult en France et au Maroc. Il s’appuie également sur des messages relatifs à ces cyberattaques attribués à Sébastien Raoult, alias Sezyo sur les réseaux, sur Discord.
Sa défense fait ainsi valoir que s’il a piraté des entreprises étrangères, il l’aurait fait depuis le sol français et que, dès lors, la justice française est compétente.
Sébastien Raoult a été « sacrifié », selon son avocat
Mais le 3 août, le ministre français de la Justice, Éric Dupond-Moretti, avait affirmé ne pas avoir « la possibilité, à ce stade, d’intervenir ».
Lundi sur LCI, la porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Anne-Claire Legendre, a dit comprendre « évidemment l’inquiétude de son père » et « tout faire (…) pour lui apporter toute la protection consulaire que nous pouvons », sans se prononcer sur la possibilité de l’extrader en France.
« Nous estimons que Sébastien Raoult n’a pas simplement été abandonné par la France, mais qu’il a été sacrifié », a poursuivi Me Ohayon, qui demande la saisie de l’Inspection générale de la justice (IGJ) pour comprendre pourquoi, « dûment informées d’agissements délictuels commis depuis le territoire national, les autorités françaises n’ont pas ouvert d’enquête préliminaire ».
L’affaire suscite beaucoup d’émotion en France où le père de Sébastien Raoult a lancé dernièrement un appel au président Emmanuel Macron pour qu’il lui vienne en aide.
Cet avis de la justice marocaine « veut dire qu’il reste peu de temps à la France pour reprendre officiellement la main sur un dossier qu’elle sous-traite depuis des années aux Américains », a réagi Paul Raoult, joint par l’AFP.
« Cela ne veut pas dire ‘c’est fini, il s’en va dans une semaine’ mais le temps commence à manquer, il faut vraiment que la France se bouge : elle ne peut pas laisser tomber un ressortissant français », a-t-il ajouté.
Avec AFP