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Gaël Faye : « Le rap est une musique qui permet de s’encanailler »

Le rappeur-romancier à succès sort un nouvel album follement dansant. Rencontre avec un optimiste.

Par Anne-Sophie Jahn Le Point.fr

L'ecrivain et rappeur Gael Faye.
L’écrivain et rappeur Gaël Faye. © CHARLOTTE LAPALUS

Fini le déni. Il était nomade, cosmopolite, toujours en mouvement entre deux continents, vivant entre Kigali et Paris, et parcourant constamment le monde pour ses concerts ou pour promouvoir son premier livre Petit Pays, écoulé à plus d’un million d’exemplaires, traduit en près de 40 langues, récompensé du prix Goncourt des lycéens en 2016 et adapté au cinéma par Éric Barbier. Les ailes coupées par le Covid-19, qui l’a forcé à annuler sa tournée, Gaël Faye s’est, comme tout le monde, sédentarisé. « C’est terrible parce que la scène constituait l’essentiel des revenus des musiciens… Heureusement que mon métier est aussi d’écrire. Pour ça, je n’ai besoin que d’une pièce, d’une feuille et d’un stylo », commente-t-il résigné. Il redresse son grand corps fin sur sa chaise. Il est calme, précis, sûr de lui. Diplômé d’une école de commerce, Gaël Faye a travaillé deux ans dans la finance à Londres avant de se consacrer au rap. Révélation scène aux Victoires de la musique 2018, dans ses chansons et son best-seller, il racontait son enfance joyeuse en Afrique brisée par le génocide des Tutsis qui força sa famille à déménager en France… Mais son troisième album, Lundi méchant, appelle au lâcher prise. « Chauffez, chauffez, ouais t’entends / Les pulsations dans tes tympans / Chantez, chantez ce cancan / Écoutez, goûtez Lundi méchant ! », rappe-t-il. Au Burundii, où il est né il y a 38 ans d’une mère rwandaise et d’un père français, « lundi méchant » signifie sortir en boîte de nuit le lundi soir, sans attendre le week-end pour s’amuser.

Et on s’amuse en écoutant cet opus rap, pop, R & B et afro-beat, aux sons chauds empruntés aux différents mondes dans lesquels il a navigué (Noirs, Blancs, riches, pauvres, Afrique, Europee, ville, forêt, fonds d’investissement, musique…) et discrètement parsemés de bruits d’ambiance de rue. Encouragé par les chorégraphies réalisées avec ses filles de 7 et 10 ans sur Tik Tok, Gaël Faye a privilégié les accords et les mots qui font danser. Le résultat est moins imagé et plus musical. Déployant ses longs doigts sur la table, il explique au Point : « Contrairement à mes habitudes (le rap de 16 rimes), j’avais envie d’écrire des chansons. J’ai commencé par les mélodies, puis chanté en yaourt, puis écrit les textes, en fonction de la mélodie et non l’inverse. Je pense que je donnais trop d’importance aux textes avant. Je me suis rendu compte que mon public ne pouvait pas chanter les refrains avec moi sur scène, c’était trop écrit. Cette fois, je voulais que tout le monde puisse chanter, comme dans les concerts de rumba. Je parle aussi moins de moi, de ma vie, mon “je” est impersonnel, pour que n’importe qui puisse le reprendre à son compte. Écrire un roman m’a libéré sur tous ces sujets. J’ai pu m’amuser à expérimenter des choses. Je me suis notamment inspiré de la façon d’écrire de Brassens, d’une structure avec des phrases qui reviennent. »

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