Sénégal : Barthélémy Dias révoqué de la mairie de Dakar
Une décision fondée sur une condamnation judiciaire
Selon le préfet, cette révocation repose sur une demande d’un électeur inscrit sur les listes électorales, invoquant une « raison d’inéligibilité suite à une condamnation ». Barthélémy Dias avait été condamné en 2017 à deux ans de prison, dont six mois ferme, pour coup mortel dans une affaire remontant à 2011. Ce verdict a été confirmé en 2022, et son pourvoi en cassation rejeté par la Cour suprême en décembre 2023.
L’affaire qui lui vaut cette destitution est emblématique des tensions politiques de l’époque. En 2011, alors qu’il était maire de Mermoz Sacré-Cœur, Dias avait été impliqué dans un incident violent durant lequel Ndiaga Diouf, présenté comme un nervi, avait été tué par balle lors d’une attaque contre les locaux municipaux. Ce contexte, marqué par des violences liées à la candidature controversée d’Abdoulaye Wade pour un troisième mandat présidentiel, continue de hanter le paysage politique sénégalais.
Un double revers politique en une semaine
Cette révocation intervient seulement une semaine après que l’Assemblée nationale a prononcé, le 6 décembre, la déchéance du mandat de député de Barthélémy Dias, également pour inéligibilité. Ces deux décisions mettent fin à ses fonctions électives, à un moment où ses relations avec certains acteurs politiques, notamment Ousmane Sonko, sont au plus bas.
Dias avait pourtant tenté de se relancer sur la scène nationale lors des législatives du 17 novembre dernier, en menant la liste de la coalition Samm sa Kaddu, qui n’a pas réussi à obtenir une majorité. Ce revers électoral a ajouté aux difficultés d’un homme politique qui dénonce depuis longtemps une « cabale politique » orchestrée, selon lui, par ses adversaires.
Tensions politiques
La destitution de Barthélémy Dias n’est pas sans rappeler celle de Khalifa Sall, son mentor politique, qui avait également été révoqué de son poste de maire de Dakar en 2018, avant de perdre son mandat de député en 2019. Ces décisions, toutes deux basées sur des condamnations judiciaires, soulèvent des interrogations sur l’utilisation des procédures légales pour neutraliser des figures de l’opposition.
Pour Dias, cette nouvelle révocation est avant tout un acte politique. Il a affirmé à plusieurs reprises être victime d’un acharnement destiné à l’écarter de la scène publique. Sa rivalité avec Ousmane Sonko, leader de Pastef et ancien allié, a également exacerbé les tensions. Dias a récemment accusé Sonko d’avoir joué un rôle indirect dans son isolement politique, une guerre fratricide qui affaiblit les forces d’opposition au Sénégal.
Un avenir politique incertain
Barthélémy Dias, désormais déchu de toutes ses fonctions officielles, reste néanmoins une figure influente sur la scène politique sénégalaise. Il a convoqué une conférence de presse ce vendredi après-midi pour revenir sur les circonstances de sa révocation et clarifier ses intentions pour l’avenir. Certains observateurs s’interrogent sur sa capacité à rebondir, dans un contexte où les institutions semblent de plus en plus enclines à exclure les opposants par voie judiciaire.
Avec cette décision, le Sénégal se retrouve face à un dilemme récurrent : préserver l’État de droit ou céder aux tentations d’une instrumentalisation politique des institutions. Pour Barthélémy Dias, cette révocation marque un coup dur, mais pourrait également renforcer son statut de symbole de la résistance face à ce qu’il qualifie de « persécution politique ».
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