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Merci beaucoup pour votre accueil chaleureux, votre Excellence, Dame Sandra Mason, Présidente de la Barbade,
Madame la Première ministre Mottley, chère Mia,
Madame la Secrétaire générale, Carla Barnett,
Monsieur le Secrétaire général Guterres,
Messieurs les Présidents,
Messieurs les Premiers ministres,
Mesdames et Messieurs,
C’est un honneur pour moi de me joindre à vous, au sommet de la Communauté des Caraïbes. Et ce n’est pas un hasard si l’un de mes premiers voyages à l’étranger depuis ma réélection m’amène dans cette région. Les Caraïbes et l’Europe ont beau être situées de part et d’autre d’un océan, au cours des dernières années, nous n’en avons pas moins décidé de nous tenir du même côté de l’Histoire. Vous êtes l’une des voix les plus fortes et les plus respectées dans la lutte contre le changement climatique et la protection de la nature. Et nous avons écrit l’Histoire ensemble avec l’accord de Paris et le fonds pour les pertes et préjudices. Nous avons plaidé ensemble en faveur d’une réforme audacieuse de l’architecture financière mondiale, afin de faire face à la crise climatique, de sortir davantage de personnes de la pauvreté et de mettre un terme à l’insécurité alimentaire. Vous avez été le fer de lance de ces travaux, y compris par l’intermédiaire de l’initiative Bridgetown. Et puis, lorsque les chars russes ont envahi l’Ukraine, vous avez été le premier bloc régional à se tenir aux côtés de l’Ukraine, avec l’Europe, et avec le droit international. Vous avez agi de la sorte en raison de l’attachement indéfectible à vos valeurs. Mais également parce qu’un monde sans loi, où la force prime le droit, est tout simplement plus dangereux pour tous. Vous avez toujours plaidé en faveur d’une paix juste, non seulement en Ukraine, mais aussi au Proche-Orient, au Soudan, en Haïti. Et oui, cher Dickon Mitchell, l’esclavage constitue un crime contre l’humanité. La dignité et les droits universels de chaque être humain sont inaliénables et il faut les défendre par tous les moyens. Vous vous êtes toujours rangés résolument du côté des droits de l’homme.
Trois ans après l’invasion à grande échelle menée par la Russie en Ukraine, nous vivons dans un monde encore plus complexe. C’est pourquoi les Caraïbes et l’Europe ont plus que jamais besoin l’un de l’autre. Les grandes économies se disputent l’accès aux minéraux, aux nouvelles technologies et aux routes commerciales mondiales. Et vous savez très bien ce que cela signifie pour tous les autres. Les petits pays, en Europe comme dans les Caraïbes, ne risquent pas seulement d’être mis sous pression, mais bien d’être coupés des chaînes d’approvisionnement mondiales. Vous avez déjà été confrontés à des situations où il vous était impossible de vous approvisionner en batteries, en voitures électriques ou en vaccins. Non seulement c’est injuste, mais ce n’est dans l’intérêt de personne. Car il est des défis auxquels tous les pays sont confrontés, qu’ils soient grands ou petits, développés ou en développement. Nous devons tous stopper le réchauffement climatique et inverser la tendance. Nous devons protéger la nature, dont dépendent nos moyens de subsistance. Nous devons tous faire face aux menaces croissantes qui pèsent sur la santé humaine. Et nous devons tous exploiter les possibilités qu’offre l’économie numérique, tout en en maîtrisant les risques. Face à de tels défis, ce n’est pas dans une course les uns contre les autres que nous sommes engagés. C’est dans une course contre la montre. C’est pourquoi, même dans un contexte de concurrence acharnée, il nous faut unir nos forces. Et c’est ce qui m’amène ici aujourd’hui. Dans ce monde où certains tentent manifestement de se construire des sphères d’influence. Où des visions divergentes de l’ordre mondial mènent à une approche plus transactionnelle des affaires internationales. Où le risque de déstabilisation engendré par une concurrence intense s’accroît. Dans ce monde, l’offre de l’Europe est sans équivoque. Recherchons nos intérêts communs et travaillons main dans la main.
Et nos deux régions ont tant d’intérêts en commun. Ces dernières années, notre partenariat en matière d’investissement s’est renforcé et approfondi. Avant tout, dans le domaine de la décarbonation et de la protection de la nature. L’Europe sait à quel point la lutte contre le changement climatique est primordiale pour les États des Caraïbes, car elle est intrinsèquement liée à leur existence même. Nous savons combien il est fondamental pour les petites îles d’occuper, comme elles le méritent, une place de choix à la table des discussions afin qu’elles puissent défendre cette cause haut et fort. Soyons très clairs. Tous les continents vont devoir accélérer la transition vers la neutralité climatique. Nous devons tous faire face au fardeau croissant du changement climatique. Il est impossible de nier son impact : vagues de chaleur en Asie, inondations du Brésil à l’Indonésie et de l’Afrique à l’Europe, ouragans aux États-Unis et dans les Caraïbes. L’horloge tourne. Et oui, nous n’avons qu’une seule planète. Le changement climatique doit rester au centre des préoccupations mondiales. Et le même degré de priorité doit être accordé à son impact sur le développement.
Le monde entier doit progresser vers le « zéro net ». Chaque région devrait développer ses propres chaînes de valeur dans le domaine des technologies propres. Et chaque région devrait en récolter les bénéfices économiques. C’est là l’un des objectifs centraux de notre programme d’investissement « Global Gateway ». Nous lançons aujourd’hui un nouveau partenariat dans le domaine de la transition énergétique, pour la production d’énergie propre et d’hydrogène propre dans les Caraïbes. Mais nous concentrons aussi nos efforts sur la chaîne de valeur locale des technologies propres. Par exemple en transformant les sargasses, ces algues dangereuses, en une source d’énergie propre. Ensemble, nous pouvons trouver des solutions locales aux problèmes mondiaux les plus urgents. Il nous faut unir nos forces pour exploiter ce potentiel.
Et il y a un tel potentiel ici, dans les Caraïbes. Vous avez une main-d’œuvre qualifiée, un système éducatif solide et de nombreuses industries en expansion. Je sais que vous voulez progresser dans les chaînes de valeur mondiales. Et c’est un intérêt que nous partageons. Laissez-moi prendre l’exemple du secteur pharmaceutique. Vous avez tous en mémoire les perturbations causées par la COVID, lorsqu’il était presque impossible de se procurer non seulement des vaccins, mais aussi des médicaments de base, tels que le paracétamol. Madame la Première ministre Mottley, chère Mia, vous avez dit, plusieurs fois, combien vous étiez inquiète face à la pandémie silencieuse de la résistance aux antimicrobiens. Aujourd’hui nous comprenons tous que chaque région doit construire ses propres chaînes de valeur pharmaceutiques. C’est pourquoi nous lançons conjointement un ensemble de mesures visant à favoriser la production pharmaceutique locale dans les Caraïbes. Il bénéficie d’investissements du programme « Global Gateway » et d’investissements privés. Il prévoit aussi une coopération réglementaire, ainsi que davantage d’échanges entre nos universités. À des fins de recherche, mais aussi de formation. Tout ceci vise à construire une industrie pharmaceutique caribéenne, en commençant à la Barbade et au Guyana. L’Europe possède un savoir-faire unique et nous sommes tout disposés à le partager – de façon que vous puissiez diversifier votre économie. Parce qu’il s’agit de réduire les risques liés aux chaînes de valeur mondiales. Et c’est dans notre intérêt. C’est ce que j’appelle un intérêt commun véritable.
Mon troisième et dernier exemple est lié à l’économie numérique. Certains de vos pays se caractérisent par une scène des start-up en pleine croissance et sont incroyablement attirants pour les nomades numériques. Mais vous avez aussi des problèmes de connectivité, notamment dans les zones rurales et les îles éloignées. Nous pouvons résoudre ces problèmes ensemble. L’Europe dispose d’une infrastructure satellitaire sûre et fiable. Et aujourd’hui, nous annonçons un nouvel investissement dans la connectivité du dernier kilomètre dans les Caraïbes. Chaque région a en effet le droit de faire partie de la nouvelle ère du numérique et de l’IA. Et nous savons combien l’IA pourrait être cruciale pour faire progresser le programme des ODD, combattre la pauvreté et lutter contre les inégalités.
Mesdames et Messieurs,
Dans ce monde de géants, les petits États insulaires peuvent trouver une place nouvelle au sein des chaînes de valeur mondiales. Avec les bons investissements, vous pouvez jouer un rôle essentiel dans une économie mondiale numérique et décarbonée. C’est très important, et pas seulement pour vos propres citoyens : ça l’est aussi pour une économie plus équilibrée et plus résiliente. Dans un monde marqué par le changement, nous avons tous besoin de partenaires fiables. Et c’est ce que vous êtes à nos yeux. L’Europe sera toujours prête à vous écouter, à engager le dialogue avec vous. Un ami avec des principes, partageant les mêmes valeurs et digne de confiance. J’espère que c’est aussi ce que l’Europe représente pour vous.
Merci. Vive les Caraïbes. Et vive l’Europe.