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COP29 : la désillusion des pays africains

La 29ème conférence mondiale sur le climat (COP29) s’est terminée ce dimanche à Bakou en Azerbaïdjan. Les pays africains avaient notamment pour objectif d’obtenir plus de financement pour faire face au changement climatique. Résultat, le compte n’y est pas.

Adonia Ayebare, l’ambassadeur de l’Ouganda aux Nations Unies, à gauche, s’entretient avec Evans Njewa du Malawi, président des pays les moins avancés, au centre, et d’autres avant une session plénière du Sommet des Nations Unies sur le climat COP29, dimanche 24 novembre 2024, à Bakou, Azerbaïdjan.

Des applaudissements mais peu d’avancées. A Bakou, en Azerbaïdjan, les négociations de la 29ème conférence mondiale sur le climat ont pris fin, sans enthousiasme, ce dimanche 24 novembre. Un accord financier a été obtenu mais il est bien en deçà des objectifs que les pays africains s’étaient fixés.

En arrivant en Azerbaïdjan le 11 novembre, les négociateurs africains avaient la mission d’obtenir 1300 milliards de dollars par an à compter de 2025. Un objectif ambitieux pour la délégation car à l’heure actuelle, les pays développés financent seulement à hauteur de 100 milliards de dollars l’adaptation au changement climatique des pays en développement.

 « des promesses vagues »

L’accord scellé durant la seconde nuit de prolongation est loin de satisfaire les pays africains. Le financement promis en 2035 “est trop faible, trop tardif et trop ambigu” a dénoncé le Kényan Ali Mohamed au nom du groupe africain.

L’engagement financier est « d’au moins 300 milliards de dollars » annuels d’ici 2035 pour les Etats-Unis, le Canada,  l’Australie, le Japon, la Nouvelle-Zélande et des pays européens. Cet argent doit permettre aux pays en développement de s’adapter aux inondations, aux canicules et aux sécheresses. Ce financement doit également permettre d’investir dans des énergies bas carbone.

Le montant obtenu est décevant pour Mohamed Adow, directeur de Power shift Africa, groupe de réflexion dédié au climat sur le continent. Dans un message publié sur X à l’issue de la conférence mondiale sur le climat, il fait part de son mécontentement. «  Le monde riche a organisé une grande évasion à Bakou. Sans argent réel sur la table et avec des promesses vagues et irresponsables de fonds à mobiliser, ils tentent de se soustraire à leurs obligations financières en matière de climat « , affirme Mohamed Adow.

Pour le Climate action network (CAN), qui rassemble un grand nombre d’ONG de défense de l’environnement, cette COP a été « la plus horrible depuis des années ». Asneem Essop, directrice exécutive du réseau, a accusé les pays développés de « mauvaise foi » et d’une volonté de «  trahir » les pays du Sud.

La déception est également grande pour Faten Aggad, directrice d’African future policies hub :  » Je comprends l’instinct naturel des négociateurs voulant ramener à la maison un accord. mais c’est aussi dans l’intérêt de nos pays de savoir rebrousser chemin. Pas d’accord vaut mieux qu’un accord où les pays africains n’ont pas de réels fonds pour s’adapter au changement climatique. »

Pour François Gemenne, président du conseil scientifique de la fondation pour la nature et l’homme et membre du GIEC, les négociations de la COP29 étaient «  extrêmement symboliques sur un montant qui devrait fixer une sorte de justice climatique entre pays du nord et pays du Sud. »

Les 1300 milliards de dollars demandés par les négociateurs africains ne font pas débat au sein de la communauté scientifique. «  Le montant était du reste légitime. Pour donner deux ordre d’idées, il y a aujourd’hui davantage de panneaux solaires en Belgique que sur la totalité du continent africain donc cela donne un aperçu de l’ampleur des financements nécessaires pour la transition énergétique en Afrique. Par ailleurs, il a été estimé que les besoins de la transition en France se montent à 67 milliards d’euros par an. Ce montant est moins de 5 fois supérieur à la somme demandée pour un ensemble de pays qui représentent bien plus que 5 fois la France. » souligne François Gemenne

Absence de décisions concrète

Les Occidentaux dont les Européens, premiers bailleurs mondiaux de finance pour le climat, n’étaient pas prêts à aller au-delà des 300 milliards de dollars, en période de resserrement budgétaire et de secousses politiques. « Toute la négociation a porté sur la somme de ce montant global qui n’a aucune matérialité. » ajoute François Gemenne, interrogé par TV5MONDE.

La COP29 n’a pas permis l’émergence de décisions concrètes en faveur de la transition ou de l’adaptation des pays africains au changement climatique. “Si les pays du sud n’ont pas les moyens de faire leurs transition énergétique, ils auront recours aux énergies fossiles pour répondre aux besoins en électrification etc. C’est déjà ce que commencent à faire des pays comme le Sénégal et l’Ouganda. Les autorités sénégalaises ont décidé d’exploiter les champs pétrolifère, de même pour le pouvoir ougandais avec le fameux pipeline Eacop. Les pays africains cherchent à exploiter leurs ressources pétrolières. Si l’on souhaite que ces ressources restent dans le sol, il faut absolument dégager des montants pour faire la transition aussi dans les pays du Sud.” détaille François Gemenne.

Du point de vue de la France, le texte est «décevant» et « pas à la hauteur des enjeux », a dit la ministre française de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher. Elle a regretté « une absence de leadership de la présidence » azerbaïdjanaise.

Le commissaire européen chargé des négociations sur le climat Wopke Hoekstra a émis des regrets: les Européens auraient « aimé voir plus d’ambition «  sur la baisse des gaz à effet de serre dans tous les pays. Le renvoi de ce débat à l’année prochaine « est un échec « , a estimé Kévin Magron, ambassadeur français pour le climat

Le travail est donc encore immense pour préserver la planète. Le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, a dit voir dans cet accord « une base sur laquelle construire ».

L’arrière-plan inédit de cette 29ème COP était une année 2024 qui sera vraisemblablement la plus chaude jamais mesurée. Et, neuf ans après l’accord de Paris, qui vise à limiter à 1,50°C le réchauffement de la planète par rapport à l’ère pré-industrielle, l’humanité va encore brûler plus de pétrole, de gaz et de charbon que l’année passée.

«Si la transition ne se fait pas aussi dans les pays du Sud, quelque part, la baisse des émissions au Nord sera compensée par la hausse des émissions des pays en développement. Ce que les pays industrialisés ne réalisent pas bien, c’est qu’il est aussi dans leur intérêt de financer la transition dans les pays du Sud.» précise François Gemenne.

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